Les fonctionnaires européens ne déposant pas de déclaration fiscale sont donc dans l’erreur et les conséquences pouvant en résulter sont sérieuses. Il est donc important de rappeler les principes applicables, en ce compris les règles spécifiques, dont la compréhension n’est pas toujours aisée.
Quoique soumis à un régime d’imposition particulier, le fonctionnaire européen est un contribuable comme les autres, assujetti aux obligations fiscales en vigueur dans son Etat de résidence fiscale.
Etat du domicile fiscal et « Exception de résidence »
En principe, le fonctionnaire européen est résident fiscal du pays sur le territoire duquel est établi son domicile fiscal. En Belgique, on vise le lieu de résidence effective, caractérisé par une certaine stabilité dans le temps. Le domicile fiscal est le lieu où est établie la vie familiale et sociale du contribuable.
Par exception, le fonctionnaire européen conserve son domicile fiscal dans le pays où il résidait au moment de son entrée en service, lorsque les trois conditions suivantes sont cumulativement remplies :
1. le domicile initial du fonctionnaire était situé dans un Etat membre de l’Union ;
2. le fonctionnaire a établi sa nouvelle résidence sur le territoire d’un autre Etat membre ;
3. en raison de l’exercice de fonctions professionnelles au service de l’Union.
Cette exception dite « exception de résidence » a des effets particuliers : des fonctionnaires européens vivant et travaillant dans certaines Etats membres (essentiellement, la France, le Grand-Duché de Luxembourg et la Belgique) sont considérés comme des résidents d’un autre Etat membre.
Cette règle s’impose au fonctionnaire européen, aussi longtemps qu’il en service. Dès ce service terminé, en raison par exemple d’un départ à la retraite, l’exception de résidence ne s’applique plus. Le fonctionnaire européen peut alors voir sa résidence fiscale transférée d’un Etat à un autre, du jour au lendemain, sans que ses habitudes de vie n’aient changé.
Quelles obligations ?
Impôts sur les revenus
Dans son Etat de résidence, le fonctionnaire européen doit déposer une déclaration fiscale. Le contenu de cette déclaration peut varier d’un Etat à l’autre, mais le principe reste constant. Précisons encore qu’en Belgique, si le fonctionnaire européen est marié à ou cohabite légalement avec une personne résidant en Belgique, ils établiront une déclaration fiscale distincte.
Par exception, le fonctionnaire européen ne doit pas déclarer les revenus de son travail pour l’Union, qui sont effectivement taxés par l’Union. En revanche, tous les autres revenus devront être déclarés, quelle qu’en soit la source.
Il en sera de même pour de nombreuses autres informations à communiquer à l’administration fiscale de l’Etat de résidence, notamment les comptes bancaires ouverts à l’étranger dont le fonctionnaire européen serait titulaire.
Dans un Etat membre autre que son Etat de résidence, le fonctionnaire européen peut également avoir des obligations déclaratives s’il est, par exemple, propriétaire d’un bien immeuble situé sur le territoire de cet Etat.
Droits de succession
Il existe également des obligations à charge des héritiers du fonctionnaire européen, dans l’hypothèse de son décès.
Il faut alors être attentif au fait que, si le décès intervient alors que le fonctionnaire européen est encore en service, l’exception de résidence s’appliquera.
La succession d’un fonctionnaire européen, dont le domicile fiscal est établi en Espagne, mais qui réside en Belgique, sera donc soumise à l’impôt espagnol, s’il décède « en service ». S’il demeure en Belgique après son départ à la retraite et décède, sa succession sera en revanche soumise à l’impôt belge.
En conclusion
Si le fonctionnaire européen est incontestablement soumis à quelques règles particulières, elles ne modifient pas sa qualité de contribuable qui, dans l’un ou l’autre Etat, est tenu, chaque année, de déposer une déclaration fiscale, en y mentionnant de très nombreuses informations.
En réalité, le fonctionnaire européen, du fait des règles évoquées ci-dessus et de son style de vie, partagé entre l’Etat membre où il travaille effectivement et son Etat membre d’origine, se retrouve souvent dans une situation complexe, avec bien plus d’obligations fiscales qu’un contribuable ordinaire.
Maître Mikaël Gossiaux
A propos de l’auteur
Maître Mikaël Gossiaux est avocat au barreau de Bruxelles depuis 2004, et est associé depuis 2018 au cabinet Hirsch & Vanhaelst. Sa solide connaissance de la fiscalité des entreprises et des personnes, l’amène à intervenir tant au stade du conseil que du contentieux administratif ou judiciaire. Il a le titre de Professeur associé, membre du Centre de Droit privé de l’Université Libre de Bruxelles (Unité de droit fiscal).