Depuis la révolution industrielle, la réduction de la durée du travail est devenue synonyme de progrès social. La limitation du temps d’activité des salariés a été une revendication constante des syndicats. Elle s’inscrit dans une évolution historique continue : d’un maximum de 48 heures fixé dans la Convention N° 1 de l’OIT (1919) à une durée légale hebdomadaire du travail à 35 heures en France (1998).
Si pour les salariés il s’agit d’assurer par là un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, la limitation du temps de travail est aussi dans l’intérêt bien compris de l’employeur, pour préserver le rendement et l’efficacité des travailleurs. En outre, elle peut bien s’inscrire dans l’objectif de combattre le chômage par un partage du travail (« Travailler moins pour travailler tous »).
Europe : le temps révolu du progrès social
La directive européenne 93/104/CE, fondée sur le traité CE, qui affichait l’objectif « de promouvoir l’amélioration des conditions de vie et de travail de la main-d’œuvre permettant leur égalisation dans le progrès » (article 117 du traité CE, voir actuellement l’article 151 du TFUE), fixe des prescriptions minimales, comme suit (article 15) :
« La présente directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres d’appliquer ou d’introduire des dispositions législatives, réglementaires ou administratives plus favorables à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs ou de favoriser ou de permettre l’application de conventions collectives ou d’accords conclus entre partenaires sociaux plus favorables à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs ».
La durée du travail dans les institutions européennes
En matière de politique sociale, des instruments juridiques de rang supérieur dans la hiérarchie des normes fixent « des prescriptions minimales » (et la durée maximale du travail en est une), en permettant à des instruments de rang inférieur de préciser les règles applicables dans un sens plus favorable.
C’est ainsi que le premier statut des fonctionnaires des institutions (adopté en 1961) se bornait à fixer un maximum hebdomadaire de 45 heures. Dans cette limite, le statut laissait à chaque institution le soin de fixer la durée de travail applicable.
En 1972, le maximum prévu par le statut (Article 55) a été revu à la baisse, à 42 heures. En 1988, les institutions européennes ont toutes réduit, par voie de décisions internes, la durée hebdomadaire de travail, qui est passée de 38h30 à 37h30 ; depuis, cet horaire s’était gravé dans l’esprit de tous comme constituant un acquis. Nous n’avons jamais imaginé que cet acquis aurait été renversé.