Le «monologue (a)social» de la Commission Von Der Leyen

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Tel que défini par l’Organisation Internationale du Travail – OIT, le dialogue social inclut tous types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants [des autorités publiques], des employeurs et des travailleurs.

Chez nous, le dialogue social devrait être le moyen par lequel la Commission, en tant qu’employeur, discute avec vos représentants syndicaux (Organisations Syndicales ou Professionnelles Représentatives ou OSP) de toute question relevant de la politique du personnel et des conditions de travail des fonctionnaires et autres agents. Les relations entre les OSP et l’employeur sont inscrites à l’article 10 quater du Statut et régies par un Accord Cadre (Accord Cadre signé conclu le 18 décembre 2008, en annexe).

Le dialogue social n’était déjà pas toujours honnêtement ou complètement respecté par les Commissions précédentes, mais avec l’actuelle, il est réduit à peau de chagrin. En effet, et à l’exception notable des décisions relatives au temps de travail et au harcèlement, il n’y a pas eu de dialogue social. De belles déclarations de principe telles que

« La Commission européenne tient à souligner son attachement à l’importance du rôle et à la responsabilité des OSP en les associant, de la manière la plus transparente et la plus efficace à la vie des institutions et des organes de l’Union »

ou

« Les OSP agissent dans l’intérêt général du personnel sans préjudice des compétences statutaires des comités du personnel »

sont-elles traduites dans la réalité quotidienne ? Certainement pas, alors qu’elles ne constituent pas le rêve d’un militant syndical quelque peu perdu dans le souvenir poignant des années passées, mais font partie d’un accord que la Commission a conclu et qui est toujours en vigueur.
La détérioration de la qualité du dialogue entre les représentants du personnel et la Commission a été progressive, mais elle s’est incontestablement et dangereusement accélérée depuis le début du mandat de la Commission actuelle.

Mais de quoi se plaignent ces vauriens du syndicat ? Malheureusement, nous n’avons que l’embarras du choix.

Si la Commission ‘’tient à souligner son attachement à l’importance du rôle et à la responsabilité des OSP en les associant, de la manière la plus transparente et la plus efficace à la vie des institutions et des organes de l’Union’’, comment cela se fait-il que

· de nombreuses règles ou modifications de règles ou autres stratégies majeures (stratégie HR, bien-être, risques psychosociaux, politique immobilière) ont été mises en œuvre/publiées soit sans consultation des corps intermédiaires (OSP et Comité du personnel) soit ont fait l’objet de consultations directes (d’une partie) du personnel à travers des sondages sans considération des corps intermédiaires qui le représentent. Bien entendu ces consultations directes résultent en un fouillis de propositions parfois contradictoires parmi lesquelles, l’employeur a bien entendu toujours trouvé celles qui lui conviennent ;

· La plupart de ces règles/modifications de règles/stratégies majeures ont fait l’objet de parodies d’échange avec les corps intermédiaires. Des ‘’réunions d’information’’, notamment sur le nouveau modèle de concours ou le rapport d’évaluation révisé ont eu lieu en même temps ou même après que les décisions de mise en œuvre aient été prises.

Si ‘’Les OSP agissent dans l’intérêt général du personnel sans préjudice des compétences statutaires des comités du personnel’’, pourquoi tente-t-on de limiter ou du moins de compliquer le plus possible, la possibilité pour les OSP de communiquer avec leurs adhérents et le personnel en général ? Or, ceci sera le résultat de l’approche proposée par la DG HR concernant l’utilisation de l’email par les OSP.
Les très aimables collègues de la DG HR nous ont expliqué et répété que ce n’est pas leur volonté, ni du niveau politique, mais une obligation que la Commission a en vertu du Règlement Général sur la Protection des Données (règlement 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016) et à laquelle on ne peut pas échapper.

Comme chacun sait, les règlements sont des actes juridiques obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tous les États membres de l’UE. Il resterait donc à expliquer comment il se fait que les autres institutions de l’UE ne se sentent pas obligées de l’appliquer en ce qui concerne les communications entre leurs OSP et leur personnel. Ignorent-elles la loi ? La connaissent-elles ? Sont-elles décidées à la violer? Ou s’agit-il d’une nouvelle tentative de la Commission de rogner les ailes des syndicats en limitant leur capacité de communication?

Finalement, selon une ‘’décision’’ de la DG HR (niveau de prise de décision : Directeur) la Commission européenne serait vraisemblablement le seul employeur dans toute l’UE qui s’arroge le droit de décider si son personnel a le droit de faire la grève ou pas. Nous sommes bien conscients que l’exercice du droit de grève est souvent réglementé et que, par conséquent, une abstention du travail peut être déclarée illicite. Mais par qui ? Pour autant que nous le sachions, toujours, au sein de l’UE, par un organisme tiers, jamais par l’employeur.

Eh bien, la Commission européenne semble être donc le seul employeur dans l’UE qui s’arroge ce droit, avec une interprétation des règles qui pourrait, par exemple, nous empêcher de déclarer une grève de solidarité avec nos collègues d’une autre Institution ou d’une Agence1.

Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire Hahn, l’Union Syndicale vous demande de reprendre l’habitude d’un dialogue franc et ouvert avec les représentants du personnel et de rappeler à vos collaborateurs et aux services placés sous votre responsabilité politique, qu’il conviendrait de diminuer le rythme des sermons et des menaces de sanctions adressés aux tiers (à l’intérieur et à l’extérieur de l’UE) et de revenir à la bonne habitude « to lead by exemple« .

Nous restons confiants que ceci est possible. L’administration de notre Institution a fait preuve de sa capacité à mener à bien ce type de dialogue constructif lors de la préparation du dossier clé « Temps de travail et travail hybride ». Nous regrettons que ce soit l’exception !

[1] Note ARES(2022)7497993 : « il s’agit d’une grève de solidarité [avec un mouvement national] portant sur des revendications sur lesquelles la Commission européenne ne peut agir… »

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