Je suis membre
Pas encore membre
Devenir membre
Précédent

Les femmes redéfinissent l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée dans les syndicats

Précédent
Suivante

Les femmes redéfinissent l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée dans les syndicats

Suivante
Agora #90
39-55

Pour les femmes engagées dans les syndicats, la recherche d'un équilibre entre vie professionnelle et vie privée revêt une signification et une complexité uniques.

Dans le paysage en constante évolution du lieu de travail moderne, le concept d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée est devenu une préoccupation essentielle pour les individus de diverses professions. Cependant, pour les femmes engagées dans les syndicats, la recherche d’un équilibre entre vie professionnelle et vie privée revêt une signification et une complexité uniques. En effet, parmi nos milliers de membres, 51 % sont des femmes. Certaines d’entre elles sont membres de notre bureau fédéral et siègent au sein de notre comité exécutif. Ce sont des femmes qui ont réussi à concilier leurs engagements professionnels et leur vie privée tout en contribuant à l’évolution de nos syndicats.

Dans cette série d’entretiens, nous leur avons donné des séries de questions et elles ont choisi les questions auxquelles elles voulaient répondre. Ces séries d’entretiens sont leurs voix, les échos de leurs opinions qui éclairent leurs perspectives, leurs idées et leurs expériences, mettant en lumière l’intersection du genre, des syndicats et de la recherche d’un équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Elles donnent un aperçu de leur définition personnelle de cet équilibre crucial entre vie professionnelle et vie privée et expliquent pourquoi il revêt une importance particulière dans le contexte de leur rôle au sein des syndicats.

L’un des thèmes centraux de cette discussion tourne autour du rôle des syndicats dans le soutien apporté aux femmes dans leur quête d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Existe-t-il des initiatives, des politiques ou des programmes spécifiques mis en place par les syndicats pour traiter ces questions ? Les femmes disposent-elles d’une flexibilité et d’aménagements suffisants pour gérer leur vie professionnelle et personnelle au sein de ces organisations, et quelles sont les améliorations suggérées ?

Leurs histoires et leurs points de vue constituent des sources d’inspiration et des révélations précieuses pour les femmes de tous âges et de tous horizons qui s’efforcent d’atteindre une harmonie et un équilibre délicats entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle. (AK)

Pour lire l’intégralité de l’interview, veuillez cliquer sur les noms des différents auteurs ci-dessous

Sandrine est membre de l’Union Syndicale depuis 2018 et s’est impliquée activement au début de l’année 2022 lorsqu’elle a été élue comme l’une des vice-présidents du conseil d’administration de l’Union Syndicale Bruxelles.  Elle est en charge des questions juridiques et a été désignée pour participer à certaines commissions paritaires (mélange de représentants du personnel et de l’administration pour discuter de sujets particuliers) comme la COPEC (commission de l’égalité des chances). Elle participe également à divers exercices conjoints tels que les réunions avec les DG pour les reclassements (et les promotions), et s’implique activement dans divers dialogues sociaux, notamment sur les questions concernant les collègues travaillant dans les délégations de l’UE à l’étranger ou le statut des agents contractuels.

  1. Qu’est-ce qui vous a motivé à devenir membre d’un syndicat ?

(Hélas) ma motivation est venue de problèmes vécus et de l’envie d’éviter cela à d’autres en me servant positivement de mes expériences pour les mettre au service des collègues.

  1. Comment définiriez-vous « l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée » et pourquoi pensez-vous qu’il est important, en particulier pour les femmes dans notre syndicat ?

Pour moi, l’équilibre entre les 2 sphères – privée et professionnelle – existe lorsque l’on peut profiter et s’épanouir dans chacune d’elles sans que l’une de ces sphères ne vienne « s’inviter » indûment dans l’autre et vienne donc perturber l’autre sphère. Je pense que cet équilibre est propre à chacun et vaut aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Mais contrairement à une balance, il est clair que plus on met/on « accepte » de charge dans l’une de ces sphères, moins on pourra en mettre/accepter dans l’autre.

Toute la difficulté est de trouver le bon équilibre propre à chacun. A l’heure où les charges familiales/parentales pèsent encore souvent largement sur les épaules des femmes mais où on leur demande pourtant d’être aussi efficiente, efficaces, productives que leurs collègues masculins, on voit que l’équilibre pour elles est d’autant plus difficile à atteindre ou garder.

Selon moi, c’est d’ailleurs la féminisation grandissante du marché du travail qui a fait apparaitre et mis en avant cette notion d’équilibre des sphères privée et professionnelle. En effet avant l’équilibre était plus facile et sa basait sur les 2 personnes du couple : à l’homme la sphère professionnelle, à la femme la sphère « privée » (familiale). Maintenant que tout le monde entre dans la sphère professionnelle (celle – la seule – qui permet d’exister aux yeux de la société et de gagner sa vie), il faut redistribuer les tâches de la sphère privée. Et le monde de l’entreprise/du travail devrait s’y faire et participer aussi.

Car cet équilibre est essentiel pour la santé (physique et mentale) et le bien-être de tous.

  1. Selon vous, quels sont les éléments clés qui contribuent à un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?

L’aptitude et la possibilité de séparer les 2 :

–           aptitude dans le sens qu’il faut pouvoir se laisser à soi-même un temps pour le travail et un autre pour sa vie privée (et s’y forcer au besoin)

–           et possibilité en ce sens qu’il faut un travail/une vie privée qui permette – non seulement théoriquement mais aussi pratiquement – d’avoir cette scission régulièrement

Avec les nouvelles technologies, on a cependant rapproché sphère professionnelle et vie privée, ce qui facilite le passage de l’un à l’autre (et évite la perte de temps des trajets pour se rendre à son travail) mais empêche du coup d’avoir une claire frontière entre les 2 sphères et entraîne des conséquences sur le bien-être et la santé des gens (cfr le nombre important de burn-out actuellement).

Certains périodes/évènement de la vie peuvent aussi exiger que l’une des sphères soit à moment plus dense/chargée requérant normalement d’alléger l’autre. C’est le cas par exemple de la parentalité qui, venant ajouter un nombre de tâches important dans la vie privée, devrait se traduire par une diminution des tâches dans l’autres sphère, ce qui n’est pas toujours possibles (vu les conséquences financières – perte de salaire- ou d’avancement de carrière qu’elles occasionnent). En résulte la aussi un déséquilibre avec ses conséquences sur la santé des personnes (burn-out). Et en particulier pour les femmes (qui assument toujours majoritairement les tâches familiales).

  1. Quels sont certains des défis communs auxquels vous avez été confronté pour maintenir un équilibre satisfaisant entre vie professionnelle et vie privée dans votre institution ?

Généralement tout changement dans l’une ou l’autre sphère peut avoir un impact sur l’équilibre. Selon moi, l’un des défis principaux est celui de la parentalité. Le moment où l’on devient parent est un moment extrêmement compliqué pour arriver à maintenir un équilibre correct entre vie privée et professionnelle car évidemment votre vie privée se retrouve soudainement chamboulée et « chargée » mais rien ne change généralement dans la sphère professionnelle.

La conséquence au niveau professionnel sera généralement une stagnation ou un retrait/une diminution du travail (ce qui aura évidemment des conséquences financières et sur l’avancée de carrière). Ceci est hélas particulièrement vrai pour les femmes qui portent encore souvent largement le poids des tâches familiales.

J’ai ainsi en tête l’histoire d’une collègue, chef d’unité adjointe (donc dont la compétence avait déjà été reconnue) mais qui a refusé un poste de chef d’unité qu’on lui proposait car étant maman de 2 jeunes enfants, elle estimait qu’elle ne pourrait pas le faire correctement (son mari lui était bien chef d’unité).

  1. Avez-vous déjà eu l’impression que votre équilibre entre vie professionnelle et vie privée était compromis par la nature de votre travail ? Si oui, comment y avez-vous remédié ?

Oui mais pas tellement en raison de la nature de mon travail mais plutôt de l’absence de flexibilité suffisante pour tenir compte d’un changement important et assez courant de la vie privée : celui de devenir parent. Encore actuellement je ne suis pas sûre d’avoir atteint un équilibre. En l’occurrence après avoir vécu une expérience professionnelle difficile dans une délégation, ce qui m’a obligée à revenir « récupérer » au siège, je me vois dans « l’obligation » de repartir car constatant qu’en Belgique (en Europe je pourrais dire), la gestion d’un temps plein et de 3 enfants en bas âge est très difficile et ne permet surement pas un équilibre vie privée/vie professionnelle. On reçoit très peu d’aide. Je repars donc en délégation où je pourrai en principe trouver plus d’aide (vu le salaire plus élevé du aux primes d’expatriation – le prix pour être loin de chez soi et des siens et loin d’un système de santé sûr – et la possibilité d’engager du personnel d’aide). D’autres formules auraient pu être possibles mais n’existent pas.

  1. Comment un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée affecte-t-il votre bien-être général et votre satisfaction au travail ?

Les 2 sont évidemment liés. De cet équilibre dépend le bien-être et la motivation.

  1. Comment le syndicat vous a-t-il aidée, vous et d’autres femmes à trouver un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?

Le syndicat me permet de procurer à d’autres ce que j’aurais voulu recevoir lors des moments difficiles vécus au travail (et qu’il est très difficile d’obtenir via le système-même) : de l’écoute, de la compréhension, de l’aide dans les démarches possibles à entreprendre face à un problème …Ceci me donne l’impression d’être utile, ce qui pour moi est important. Je ne pense pas que ceci ait cependant un impact sur l’équilibre entre les 2 sphère : il s’agit ici clairement d’améliorer l’une de ces sphères : celle du travail.

  1. Existe-t-il des initiatives, des politiques ou des programmes spécifiques que le syndicat a mis en place pour traiter les questions d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?

US a organisé plusieurs workshops sur le sujet mais on peut toujours faire plus. Comme j’ai répété au long de cette interview, un moment particulier où il existe réellement un risque de basculement de cet équilibre est le moment ou l’on devient parent. Je trouverais intéressant qu’on s’y intéresse (au niveau de l’institution…ce qui pourrait se faire via le syndicat)

J’ai participé il n’y a pas longtemps à un séminaire sur la « parentalité en entreprise » que j’ai trouvé très intéressant et qui vise notamment d’une part à expliquer aux managers/dirigeants la manière de mieux tenir compte de ce moment important (et assez inévitable) de la vie de leurs salariés (pour éviter de les « brûler ») et d’autre part des tips aux salariés « parents » pour arriver à mieux conjuguer leur rôle de parent et de travailleur (sans se « brûler »).

En termes d’initiatives, je pense par exemple à la proposition du Parti Socialiste (PS) en Belgique qui a récemment soumis une proposition de loi visant à harmoniser le congé de paternité avec celui de maternité (actuellement fixé à 15 semaines en Belgique) et à le rendre obligatoire. Cette initiative ouvrirait la voie à une répartition plus équitable des responsabilités familiales, supprimerait un risque de discrimination à l’embauche (lorsqu’un employeur voit une femme devant lui et craint déjà le moment où elle va lui annoncer sa grossesse), permettrait aux femmes de gérer de façon plus sereine leur début de grossesse (la crainte de « l’annonce » à l’employeur) et offrirait aux pères et aux coparents un droit/devoir équivalent pour prendre soin de leurs enfants allégeant ainsi un peu les charges pesant sur la femme. Cette proposition pourrait également servir d’inspiration au syndicat.

  1. Dans votre institution, pensez-vous qu’il y a suffisamment de flexibilité et d’aménagements pour que les femmes puissent gérer leur travail et leur vie privée ? Quelles améliorations suggéreriez-vous ?

Pour moi, ce n’est pas suffisant. Mais pas pour les femmes en tant que telles, plutôt pour les parents (en particulier celui qui assume l’essentiel des charges familiales, c’est vrai souvent les femmes…mais il arrive que ce soient des hommes).

Il faudrait mieux intégrer la parentalité dans le monde du travail (aussi bien les hommes que les femmes). Ceci pourrait commencer par un accès élargi à l’information, fournissant réconfort, explications et préparation aux futurs parents. Une proposition concrète qui a été mentionnée au cours d’une conférence sur l’intégration de la parentalité en entreprise que j’ai suivie, était la création d’un guide de parentalité qui pourrait inclure :

  • Informations légales et administratives : Offrir une vue d’ensemble des droits et des lois liés à la parentalité, y compris les congés parentaux, les avantages sociaux et les garanties de protection de l’emploi.
  • Gestion du temps et de la charge de travail : Conseils sur la façon d’ajuster son emploi du temps pour s’adapter aux besoins de la famille, en mettant en avant les options de travail flexible, le télétravail et les horaires aménagés.
  • Options de garde d’enfants : Fournir des informations détaillées sur les types de garde d’enfants disponibles, qu’il s’agisse de crèches, de garderies, d’assistantes maternelles ou d’autres solutions, ainsi que des conseils pour choisir la meilleure option en fonction des besoins familiaux.
  • Gestion du bien-être parental : Aborder des sujets tels que la prévention de l’épuisement parental, la gestion du stress et de l’anxiété, et offrir des ateliers pratiques comme le retour au travail après le congé maternité/paternité, vivre sa grossesse au travail, équilibrer vie professionnelle et vie personnelle, ainsi que des stratégies pour éviter le burn-out parental.
  • Congés parentaux : Expliquer en détail les congés disponibles pour les parents, y compris les congés de maternité, de paternité et de maladie de l’enfant. Mettre en avant les procédures de demande et les ressources pour s’assurer que les parents comprennent pleinement leurs droits.
  • Soutien psychologique et émotionnel : Mettre en place des ressources pour le soutien psychologique et émotionnel, comme des séances de coaching ou de conseil pour les parents qui traversent des moments difficiles.
  • Ressources familiales : Fournir des informations sur les groupes de soutien pour les parents, les associations familiales, les réseaux sociaux et autres moyens de se connecter avec d’autres parents.
  • Équilibre entre travail et vie personnelle : Offrir des stratégies et des conseils pour maintenir un équilibre sain entre le travail et la vie personnelle, en insistant sur l’importance de prendre du temps pour soi.
  • Rôle des managers et des collègues : Sensibiliser les gestionnaires et les collègues à l’importance du soutien envers les parents, en soulignant les pratiques de leadership inclusives et les manières de créer un environnement de travail favorable.
  • Évolution de la culture d’entreprise : Proposer des pistes pour promouvoir une culture d’entreprise inclusive, qui valorise l’équilibre entre travail et vie personnelle et encourage l’égalité entre les sexes en matière de responsabilités familiales.
  1. Avez-vous eu recours à des formules de travail flexibles, telles que le travail à distance, les horaires flexibles ou le partage d’emploi, pour vous aider à maintenir un bon équilibre ? Quel a été l’impact de ces mesures sur votre expérience ?

Oui j’ai utilisé la formule du « congé parental » pendant les vacances scolaires : impact : très léger en termes d’équilibre puisque c’est parce que la sphère privée allait être plus chargée (cfr s’occuper de 3 enfants de moins de 10 ans en congé) que j’ai décidé d’alléger l’autre. J’ai donc conservé le même équilibre…déjà déséquilibré vu ma réponse précédente et mon besoin de partir pour trouver plus d’aide 😉 et évidemment avec, par contre, une contrepartie négative au niveau financier.

  1. Existe-t-il une perception selon laquelle le fait de donner la priorité à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée pourrait entraver la progression de la carrière, en particulier pour les femmes ? Comment cette perception peut-elle être prise en compte ?

Évidemment, la perception générale est encore celui de se « donner » au travail. Mais je pense que les choses changent avec la jeune génération qui attache de plus en plus d’importance à cet équilibre quitte à sacrifier l’avancée de carrière, ce qui pourrait peut-être à terme faire changer les mentalités sur ce qui est important.

  1. Quels conseils donneriez-vous aux jeunes femmes qui s’inquiètent de devoir concilier leurs aspirations professionnelles et leurs engagements personnels ?

Soyez fortes, sachez ce que vous voulez et dites-le, les chosent peuvent changer (et changent) mais ne renoncez pas (ni à la vie de famille ni à la vie professionnelle), battez vous pour que les choses changent et qu’il y ait un meilleur équilibre.

  1. Quel rôle pensez-vous que les employeurs et l’institution dans son ensemble devraient jouer dans la promotion de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée pour les femmes ?

Les employeurs et l’institution dans leur ensemble jouent évidemment un rôle sociétal crucial en ce qui concerne la promotion de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Dans un monde en constante évolution, il est impératif que les employeurs soient en phase avec les besoins changeants de la société et qu’ils mettent en place des mesures qui répondent aux attentes des nouvelles générations. Et une des nouvelles attentes est clairement cet équilibre vie privée/vie professionnelle.

Les employeurs et l’institution doivent donc tout d’abord reconnaître que l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée est devenu un critère déterminant de l’attractivité d’un emploi pour la nouvelle génération mais aussi un facteur important pour la satisfaction et le bien-être des employés au travail. Ils devraient aussi intégrer que la parentalité est une source de déséquilibre assez courante et relativement inévitable dans une entreprise et qu’il serait donc utile d’avoir une politique positive à ce sujet.

Les employeurs et l’institution sont de toute façon les premiers à subir les effets négatifs d’une non-prise en compte d’un déséquilibre. Lorsque les besoins des parents ne sont pas pris en compte, cela peut entraîner une augmentation de l’absentéisme, du turnover et une baisse de la motivation des employés. Les femmes en particulier peuvent être touchées de manière disproportionnée, car elles sont souvent celles qui gèrent les charges familiales et sont confrontées à des défis supplémentaires liés à la maternité et à la garde des enfants.

Bref, en intégrant cette donnée et en prenant des actions positives concrètes, les employeurs et l’institution montreraient leur engagement envers le bien-être de leurs employés et contribueraient à briser les stéréotypes de genre.

  1. Y a-t-il des changements que vous aimeriez voir au sein de la profession qui pourraient faciliter un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée pour les femmes à long terme ?

Absolument, il existe plusieurs changements concrets et rapides au sein de la profession qui pourraient grandement faciliter un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée (et en particulier pour les femmes) à long terme. Les horaires flexibles et possibilités de télétravail sont l’un d’entre eux et ont déjà été largement mis en place dans l’Institution (encore qu’avec des degrés divers selon les fonctions, les institutions et DG).

A nouveau j’ajoute que l’élément qui pourrait être davantage encore pris en compte par l’institution car source de grand déséquilibre est la parentalité.

À côté du traditionnel congé parental déjà prévu, d’autres pistes pourraient ainsi être explorées pour soutenir cette période particulièrement dense pour tout parent (et en particulier les mamans) :

  • Un Guide de la Parentalité : Élaborer un guide complet et convivial offrant des informations détaillées pour concilier parentalité et carrière professionnelle au sein de l’institution (aspects légaux, avantages/facilités offerts par l’institution, ressources disponibles pour soutenir les parents) ;
  • un accompagnement lors du départ/retour en congé maternité/paternité ;
  • un soutien à l’allaitement et un aménagement des espaces de travail : par exemple, créer des zones de repos confortables et des salles de lactation spécialement équipées, comprendre que l’allaitement suit des horaires physiologiques imprévisibles, dédier des frigos au lait maternel, installer des sièges d’allaitement ;
  • un congé paternité obligatoire (pour alléger les mamans et permettre aux papas de profiter de leurs enfants aussi) ;
  • Proposer des ateliers de soutien aux parents et de sensibilisation professionnelle des managers (avec des sujets tels que la gestion de la parentalité au travail, l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, la déconstruction des stéréotypes de genre, les ressources disponibles pour les nouveaux parents et la communication efficace).
  • des solutions de garde d’enfant (en partenariat avec des service reconnus) ;
  • des programmes de mentorat intergénérationnel permettant aux femmes plus expérimentées de guider et de conseiller les plus jeunes, en partageant leurs
  • une évaluation objective de la performance : Mettre en place des processus d’évaluation de la performance qui tiennent compte des responsabilités familiales et évaluent les employés sur la base de leurs résultats plutôt que de leur présence physique au bureau.
  • des groupes de soutien internes : Créer des groupes de soutien internes où les femmes peuvent partager leurs expériences, échanger des conseils et discuter des défis spécifiques liés à la conciliation travail-famille
  • un leadership inclusif : Promouvoir un leadership inclusif qui encourage activement la participation des femmes aux postes de direction et qui valorise leur contribution équilibrée entre vie professionnelle et vie privée.
  1. Comment parvenez-vous personnellement à trouver un équilibre entre vos responsabilités professionnelles et votre vie privée ? Y a-t-il des stratégies ou des pratiques que vous trouvez particulièrement efficaces ?

Des stratégies et aides extérieures pour gagner du temps (encore mieux quand elles ne coutent rien): aide pour les courses (commande en ligne) , aide pour la cuisine (livraison de box avec recettes), aide pour la garde des enfants (famille, amis…), télétravail (même si cela empêche la claire scission entre travail et famille)…Sans tout cela, la vie en Belgique aurait été ingérable.

  1. Que pensez-vous de l’organisation du travail sur 4 jours par semaine ? Si vous êtes pour (ou contre), pouvez-vous expliquer pourquoi ?

Moi je serais pour une diminution du temps de travail…tout court : 4 jours mais avec toujours 8h/jour (les fameuses 32h française qui me paraissait une très bonne idée en termes d’équilibre vie privée/vie professionnelle).

Vaida a rejoint l’Union Syndicale Petten en 2012, peu après avoir commencé à travailler au Centre commun de recherche de Petten. Sa première action en tant que membre du syndicat a été mémorable. Elle s’est mise en grève par temps froid lorsque l’administration a décidé d’étendre le temps de travail hebdomadaire en 2012 et est restée devant la porte du site de Petten alors qu’elle attendait son troisième enfant. Vaida est membre du comité exécutif de l’US-Petten et a été récemment élue au bureau de l’USF. En tant que présidente du Comité local du personnel de Petten, elle s’est principalement concentrée, au cours de son deuxième mandat, sur les activités de dialogue social dans le cadre du Comité du personnel, ce qui est légèrement différent du champ d’action du syndicat.

  1. Qu’est-ce qui vous a incité à devenir membre d’un syndicat ?

La possibilité de faire défendre ses droits. Lorsque j’ai rejoint la Commission en 2007 en tant qu’agent contractuel, j’avais l’idée (naïve) que la Commission était l’employeur le plus progressiste et le plus équitable du monde ! Pourtant, en voyant la situation de l’intérieur, les divergences entre ce qui est déclaré et la réalité, les inégalités entre les hommes et les femmes, les plafonds de verre, les limitations pour les collègues des pays nouvellement admis, le pouvoir que certains managers et collègues toxiques acquièrent et bien d’autres choses encore, le syndicat m’a semblé être une bonne plateforme pour lutter contre l’injustice.

  1. Comment définiriez-vous « l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée » et pourquoi pensez-vous qu’il est important, en particulier pour les femmes de notre syndicat ?

Ah, la définition est toujours délicate. Et la notion de « travail-vie » implique que le travail n’est pas la vie, ce qui n’est pas mon cas. Le travail doit aussi être bien vécu, bien travaillé et il doit faire partie intégrante de votre être. En tout cas, pour moi, l’équilibre, c’est quand je ne suis pas trop stressé pendant une longue période, que je peux gérer ma charge de travail et que je suis toujours capable d’être présent pour ma famille, pas seulement pour les tâches ménagères, mais aussi pour avoir le temps d’avoir une ou deux conversations dans la semaine.

Je pense que l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée est différent mais très important pour la santé de chacun. Pendant de nombreuses décennies, les bourreaux de travail ont été portés aux nues, la société acceptant beaucoup mieux un homme qui se consacre entièrement à son travail qu’une femme qui travaille.  Je comprends que cette déclaration est une simplification totale des constructions sociales que nous avons, et certains hommes pourraient se sentir offensés par elle. Je ne peux parler qu’en ce qui me concerne. Même si j’ai un mari formidable qui me soutient, en tant que mère qui travaille, je suis souvent entraînée dans le cercle vicieux d’une culpabilité sans fin.

En tant que professionnelle, je me sens coupable si je dois quitter le travail plus tôt pour des raisons familiales et, en tant que mère, je me sens coupable lorsque je dois me concentrer sur le travail ou voyager pour le travail et manquer des événements importants dans la vie de mes enfants.

Atteindre cet équilibre entre vie professionnelle et vie privée est une aspiration, qui semble parfois impossible, même si nous disposons d’outils tels que l’horaire flexible, les congés parentaux et familiaux, les crédits d’heures, etc. Toutefois, ces outils sont limités et ne s’appliquent qu’à certaines situations critiques. En fin de compte, c’est une question d’humanité – de gentillesse et de compréhension – de la part de votre manager.

Cependant, j’ai le sentiment que grâce à Covid, le paradigme de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée a changé. Nous avons appris à travailler en mode hybride et nous réalisons actuellement les nombreux avantages du travail à domicile, tout en reconnaissant l’importance des équipes, de la collégialité, des bureaux et des sites. Tout en prouvant que la qualité du travail en mode hybride n’en souffre pas, dans certains cas, pour différentes personnes, la concentration est meilleure et l’efficacité est plus élevée dans un certain mode.

Nous devons pouvoir continuer à bénéficier de cette flexibilité, car c’est une situation gagnant-gagnant pour l’employeur et pour l’employé. Bien sûr, nous avons tous entendu l’histoire de quelques « pommes pourries », mais je crois que ces cas individuels malheureux ne devraient pas affecter le bon cadre que la Commission européenne a réussi à fournir au personnel.

« la notion de « travail-vie » implique que le travail n’est pas la vie, ce qui n’est pas mon cas »

  1. Selon vous, quels sont les éléments clés qui contribuent à un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?

Les outils susmentionnés – horaires flexibles, congés, etc. Mais il est important d’être satisfait de son travail, de se sentir utile et d’avoir la confiance et le respect de son/ses supérieur(s) hiérarchique(s).

  1. Quels sont les défis communs auxquels vous avez été confronté pour maintenir un équilibre satisfaisant entre vie professionnelle et vie privée dans votre institution ?

J’ai commencé à travailler à la Commission en 2007, le 15 septembre. Mon deuxième fils est né le 31 octobre. En Lituanie, nous avions un congé de maternité généreux, et j’ai été jugée pour avoir repris le travail alors que mon fils n’avait que 4 mois. Allaiter tout en travaillant est un cauchemar, j’étais tellement stressée que je n’y arrivais plus, et c’est encore aujourd’hui la plus grande dette que j’ai envers mon deuxième fils.  Des défis plus courants consistent à être présente pour les enfants – les pièces de théâtre, les concerts, les réunions avec les enseignants sont souvent organisés pendant les heures de travail et j’ai manqué beaucoup d’entre eux au fil des ans.

Maintenant que mes garçons sont plus âgés et qu’ils bénéficient d’un travail hybride et d’horaires flexibles, il est plus facile de planifier et de gérer que par le passé.

  1. Existe-t-il des initiatives, des politiques ou des programmes spécifiques que le syndicat a mis en place pour traiter les questions d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?

J’ai toujours été fière du fait que l’idée de l’horaire flexible soit née à Petten il y a de nombreuses années et qu’elle ait été mise en œuvre par les collègues de notre syndicat ! C’est une excellente idée qui contribue certainement à mieux équilibrer nos vies.

  1. Avez-vous eu recours à des formules de travail flexibles, telles que le travail à distance, les horaires flexibles ou le partage d’emploi, pour vous aider à maintenir un bon équilibre ? Quel impact ont-elles eu sur votre expérience ?

Oui, j’ai eu recours au travail à distance et j’ai commencé à prendre un congé parental en 2022 pour l’été. Paradoxalement, ce n’est pas pour rester avec mes enfants, mais plutôt pour passer du temps avec ma mère, mon seul parent survivant. Pendant le Covid, nous n’avons pas pu nous rendre dans mon pays d’origine et une douloureuse prise de conscience s’est opérée – ce qui compte, ce n’est pas le nombre d’années pendant lesquelles ma mère restera avec nous, mais le nombre de fois où nous la verrons. J’ai réalisé que je devais prévoir plus de temps et plus de temps de qualité avec elle et pour elle. De bonnes relations au sein de la famille sont également très importantes pour l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée.

« En tant que professionnelle, je me sens coupable si je dois quitter le travail plus tôt pour des raisons familiales et, en tant que mère, je me sens coupable lorsque je dois me concentrer sur le travail ou voyager pour le travail et manquer des événements importants dans la vie de mes enfants. »

  1. Existe-t-il une perception selon laquelle le fait de donner la priorité à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée pourrait entraver la progression de la carrière, en particulier pour les femmes ? Comment cette perception peut-elle être prise en compte ?

Je pense que c’est le cas, mais beaucoup moins que par le passé. Je pense que l’approche doit être modifiée et que les cadres supérieurs doivent l’introduire par des exemples personnels, à la fois pour eux-mêmes et pour la manière dont ils traitent leur équipe. Dans le cas du CCR, je pense que c’est ce que fait notre DG.

  1. Comment parvenez-vous personnellement à trouver un équilibre entre vos responsabilités professionnelles et votre vie privée ? Y a-t-il des stratégies ou des pratiques que vous trouvez particulièrement efficaces ?

Je ne parviens pas toujours à cet équilibre, malheureusement, la balance penche toujours vers le travail. Pourtant, cela devrait être simple : reposez-vous, déléguez, demandez de l’aide, donnez la priorité à votre santé. En fin de compte, votre famille, votre santé mentale et votre santé physique sont les choses les plus importantes.

Urszula est présidente de l’Union Syndicale au Parlement européen (US-PE) et membre du syndicat depuis 2020.

  1. Qu’est-ce qui vous a amenée à devenir membre d’un syndicat ?

Je suis avocat de la défense de par ma formation et ma pratique. J’ai toujours eu pour vocation d’aider les gens et, au sein des institutions européennes, les syndicats me donnent l’occasion de répondre à cette vocation.

  1. Quels sont les défis communs auxquels vous avez été confronté pour maintenir un équilibre satisfaisant entre vie professionnelle et vie privée au sein de votre institution ?

Le principal défi est très évident : les conditions de détachement des syndicats au Parlement européen sont prohibitives, en pratique il n’y en a pas, et par conséquent chaque militant syndical est confronté au dilemme suivant : soit il abandonne le travail syndical, soit il cumule deux emplois. Cela signifie que la plupart de mes soirées et de mes week-ends sont consacrés au travail syndical, ce qui – à long terme – n’est pas viable, car c’est le contraire de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Le fait qu’il y ait moins de femmes que d’hommes engagés dans les syndicats est – dans ce contexte – très révélateur.

  1. Avez-vous déjà eu l’impression que votre équilibre entre vie professionnelle et vie privée était compromis par la nature de votre travail ? Si oui, comment y avez-vous remédié ?

Tous les jours ! Nous avons soulevé la question du fonctionnement des syndicats au sein du Parlement européen auprès de notre hiérarchie, mais rien n’a changé jusqu’à présent.

  1. Comment la recherche d’un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée affecte-t-elle votre bien-être général et votre satisfaction au travail ?

Comme il est impossible de trouver un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée en tant que syndicaliste au Parlement européen, en raison de l’absence de dispositions appropriées pour le fonctionnement des syndicats, cela a un impact négatif évident sur la santé.

  1. Existe-t-il des initiatives, des politiques ou des programmes spécifiques que le syndicat a mis en place pour traiter les questions d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?

La question ne concerne pas le syndicat, mais les relations entre les syndicats et l’employeur.

  1. Pensez-vous qu’il y a suffisamment de flexibilité et d’aménagements pour que les femmes puissent gérer leur travail et leur vie personnelle dans votre institution ? Quelles améliorations suggéreriez-vous ?

Pendant un certain temps, notre institution a mis en place des dispositions flexibles pour le télétravail, qui ont été d’une grande aide, en particulier pour les femmes – c’est du moins ce qu’a déclaré l’écrasante majorité de nos membres. Mais il semble maintenant que le Parlement envisage de réduire le télétravail, ce qui, à notre avis, serait un pas dans la mauvaise direction. Il ne faut pas oublier qu’une grande majorité des agents travaillant dans les institutions européennes sont des expatriés, qui n’ont pas accès à l’aide de leur famille pour des questions aussi élémentaires que la garde de jeunes enfants, ce qui – soyons honnêtes – affecte particulièrement les femmes. Par conséquent, le télétravail flexible a changé la donne et nous aimerions le conserver.

  1. Avez-vous eu recours à des formules de travail flexibles, telles que le télétravail, les horaires flexibles ou le partage d’emploi, pour vous aider à maintenir un bon équilibre ? Quel a été l’impact de ces mesures sur votre expérience ?

Jusqu’à présent, le télétravail a été utile, mais l’interdiction totale du télétravail depuis l’étranger (il semble que le Parlement européen soit la seule institution de l’UE à maintenir cette interdiction) est un problème, d’autant plus que je suis actuellement en poste en Pologne. La possibilité de télétravailler de temps en temps depuis l’un des trois lieux de travail du Parlement (BRU, LUX ou STR) permettrait d’établir des contacts réguliers avec les membres de nos syndicats et m’aiderait à mieux remplir mes obligations en tant que président d’une organisation.

  1. Quels conseils donneriez-vous aux jeunes femmes soucieuses de concilier leurs aspirations professionnelles et leurs engagements personnels ?

J’observe que les femmes réussissent moins bien que les hommes à déléguer. Nous avons également tendance à être perfectionnistes. Mon conseil est de toujours se rappeler que l’on ne dispose que des outils que l’on a entre les mains, que l’on ne peut pas faire grand-chose avec un logiciel qui fonctionne mal, etc. Alors, allez-y doucement et faites de votre mieux, mais ne vous mettez pas la pression, qui n’est pas la vôtre, dans le sens où vous fonctionnez au sein d’une hiérarchie. Suivez également des cours de gestion et voyez si vous pouvez déléguer certaines de vos tâches.

  1. Quel rôle pensez-vous que les employeurs et l’institution dans son ensemble devraient jouer dans la promotion de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée pour les femmes ?

Je dirais : moins de formation et plus d’action de la part de l’employeur. Nous connaissons tous la théorie, mais ce sont les dispositions pratiques que vous mettez en place qui comptent. Il faut aussi simplifier les procédures bureaucratiques, qui absorbent une grande partie de notre temps de travail.

  1. Y a-t-il des changements que vous aimeriez voir au sein de l’institution qui pourraient faciliter un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée pour les femmes à long terme ?

Une meilleure utilisation du télétravail. Si vous réduisez le temps de trajet, vous gagnez en moyenne deux heures par jour. C’est une évidence. En outre, la plupart de mes collègues féminines ont déclaré que lorsqu’elles télétravaillent, elles prennent plus de pauses pour se déplacer (peut-être parce qu’elles portent – par défaut – des vêtements plus confortables au lieu des tenues de bureau, et que personne ne les regarde bizarrement lorsqu’elles font leurs exercices d’abdominaux :-)). Les scientifiques sont alarmés par le fait que la position assise est le nouveau tabagisme et que ses effets négatifs sont encore plus prononcés sur le corps des femmes.

  1. Comment parvenez-vous personnellement à trouver un équilibre entre vos responsabilités professionnelles et votre vie privée ? Y a-t-il des stratégies ou des pratiques que vous trouvez particulièrement efficaces ?

On attend des jours meilleurs pour les syndicats au Parlement européen !

Véronique est membre élue de l’IPSO (Organisation internationale et européenne des services publics), le seul syndicat reconnu par la Banque centrale européenne. Elle aspire à créer un lieu de travail inclusif afin que chaque employé se sente respecté et puisse progresser. Les employés sont souvent présentés comme des atouts précieux par les organisations qui ont besoin des talents de leur personnel pour réussir. La reconnaissance de leurs compétences crée, en effet, un environnement de travail sain qui, à son tour, stimule l’engagement et la productivité des employés. C’est ce qu’elle appelle un « cercle vertueux ».

Selon vous, quel est le rôle d’un syndicat ?

En tant que porte-parole des salariés, les syndicats assurent les freins et contrepoids nécessaires dans les secteurs public et privé. Au cours des dernières décennies, le monde a connu de profondes mutations : l’avènement des technologies numériques a transformé les lieux de travail, les citoyens attendent des preuves tangibles des chartes éthiques des organisations, mais aussi une transparence et une responsabilisation accrues de leurs représentants politiques…

Clairement, les citoyens souhaitent être des acteurs de leur vie, se sentent responsables, et sont très désireux de créer une société meilleure. Dans ce contexte, l’objectif des syndicats est d’améliorer les conditions de travail des salariés pour le bénéfice de tous, y compris pour les investisseurs de leur organisation, mais aussi de relever des défis sociétaux tels que la digitalisation et l’emploi, le changement climatique, la sécurité alimentaire, la sécurité sociale, le maintien des services publics, de meilleures retraites… Les syndicats ont un rôle important à jouer pour façonner nos sociétés, aux niveaux local et national, mais aussi au-delà de nos frontières.

Les gens se sentent de plus en plus préoccupés par l’avenir du monde et souhaitent participer à sa gouvernance. Je crois donc que les syndicats d’aujourd’hui doivent être définis comme des groupes de pression – des lobbies – , les représentants du personnel comme des lobbyistes au sein de leur propre organisation, mais aussi pour leur contribution à la société en général, et les salariés, par leur travail et leur engagement, comme des actionnaires de leur organisation.

Quelle est votre définition d’un environnement de travail efficace ?

Les salariés devraient se voir offrir des opportunités d’évolution de carrière, quel que soit leur tranche d’âge, leur sexe, leur nationalité, leur origine sociale (un aspect souvent négligé), leur niveau hiérarchique dans leur organisation, leur mode de travail (à temps partiel ou à temps plein), ou s’ils ont un handicap… Une organisation devrait pouvoir refléter la société telle qu’elle est, sans exclure des éléments de cette société.

Dans cette perspective, les syndicats contribuent à concevoir une stratégie RH efficace pour attirer les talents, créer de la diversité, développer des compétences avec des opportunités de promotion, mais aussi retenir l’expérience. Les connaissances acquises par l’expérience sont en effet un savoir-faire précieux souvent oublié. Et cette connaissance est liée à l’ancienneté. L’âge ne doit pas être considéré comme un obstacle mais comme une opportunité. L’expérience ne s’invente pas, elle s’acquiert avec du temps et de la patience. À travers les échecs et les succès.

Une gouvernance, si, et seulement si, elle ambitionne d’être efficace, doit également accepter la diversité de pensées : un véritable défi lorsqu’on évolue dans un milieu de travail international avec des employés aux origines culturelles diverses, qui possèdent des façons de penser et de travailler différentes, mais aussi des expériences propres et une histoire distincte avec les syndicats et la représentation du personnel dans leur pays d’origine (un aspect à ne pas négliger).

Collaborer avec les autres, se remettre en question, être prêt à écouter et à apprendre des autres peut conduire à la conception de projets innovants qui autrement n’auraient jamais vu le jour, mais qui souvent se révèlent essentiels au succès d’une organisation. C’est vrai : la créativité et l’innovation rendent une organisation unique et performante. Mais il faut que les organisations osent ! Il faut oser se remettre en question. Ont-elles l’ambition de réussir ? Cette approche est pragmatique et s’appuie sur mon expérience personnelle. Je l’ai mise en pratique et ça marche.

« L’âge ne doit pas être considéré comme un obstacle mais comme une opportunité. L’expérience ne s’invente pas, elle s’acquiert avec du temps et de la patience. À travers les échecs et les succès. »

Pensez-vous que la participation des employés à la gouvernance d’une organisation peut faire la différence ?

Que ce soit dans le secteur public ou privé, pour toute organisation, poser les bases d’un environnement de travail inclusif et respectueux commence par la participation du personnel à la conception de sa stratégie. L’Allemagne, par exemple, a mis en place une législation visant à impliquer les travailleurs dans la gouvernance de leurs entreprises, elle est appelée « Mitbestimmungsrecht » (le droit de codétermination).

Quelle est votre approche en ce qui concerne sur l’équilibre vie professionnelle – vie privée ?

Depuis l’apparition du COVID, les gens du monde entier ont commencé à s’interroger sur le sens de leur travail, leurs aspirations et l’impact de leur vie professionnelle sur leur vie personnelle. L’équilibre entre vie professionnelle et vie privée n’est pas une nouveauté, mais je dirais qu’il est devenu un sujet de préoccupation majeur depuis que l’idée de la qualité de vie est désormais largement reconnue – ce qui est particulièrement le cas pour la génération actuelle mais n’était pas nécessairement le cas pour les générations précédentes.

L’équilibre entre vie professionnelle et vie privée est lié à la participation des femmes en général, des femmes avec enfants (qui doivent souvent travailler et s’occuper de leur foyer), mais aussi de toutes celles et ceux qui aident leurs parents. Parce que « les femmes représentent la moitié du ciel », elles devraient être accompagnées dans leur vie professionnelle. Les femmes devraient se voir offrir des opportunités et un salaire égal en reconnaissance de leurs talents. Il en va de même pour tous ceux qui s’occupent de leurs parents mais aussi des handicapés et des personnes âgées. Ils font tous partie de notre société.

Contactez-nous