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Editorial #94

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Agora #94
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L'Union européenne entre dans une nouvelle phase de changement de stratégie, marquée par une réorientation significative des priorités budgétaires.

La défense des frontières européennes ouvre une nouvelle ère pour la fonction publique européenne ?

L’Union européenne entre dans une nouvelle phase de changement de stratégie, marquée par une réorientation significative des priorités budgétaires.  Le dernier en date – 800 milliards d’euros consacrés à la défense dans le cadre du « Plan ReArm Europe/Readiness 2030 » – préfigure le futur cadre financier pluriannuel (CFP).

La dernière fois, l’UE n’a investi que 8 milliards d’euros dans la sécurité et la défense. Cette fois-ci, les dépenses ont été multipliées par cent et représentent 44 % du CFP actuel. Il est évident que cette réorientation des priorités en matière de dépenses aura inévitablement des répercussions sur d’autres domaines, notamment sur la fonction publique de l’UE.

Le « Livre blanc sur la défense européenne – État de préparation à l’horizon 2030», récemment dévoilé, souligne l’urgence de réarmer l’Europe en réponse aux menaces croissantes qui pèsent sur sa sécurité et son mode de vie. Selon la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, «L’ère des dividendes de la paix est révolue. L’architecture de sécurité sur laquelle nous nous sommes appuyés ne va plus de soi. »

Le document décrit un effort à grande échelle pour renforcer les capacités de défense européennes, accroître le soutien militaire à l’Ukraine et consolider l’industrie militaire européenne. Si ces mesures répondent à des défis géopolitiques pressants, elles introduisent également des pressions financières qui auront probablement un impact sur la structure administrative et la main-d’œuvre de l’UE, notamment en termes de nouveaux profils professionnels nécessaires dans le domaine de la défense.

Les cycles budgétaires précédents ont déjà vu des réductions considérables des dépenses administratives, avec une dépendance croissante à l’égard du personnel intérimaire, des agents temporaires, des agents contractuels, des employés locaux et des contractants. Si cette tendance se poursuit, de nouvelles restrictions budgétaires pourraient affecter la stabilité et les conditions de travail du personnel de l’UE, en particulier de celui qui occupe des postes non permanents. L’accent mis sur les dépenses de défense soulève des inquiétudes quant à la poursuite de la réduction des coûts administratifs, ce qui pourrait limiter la capacité de l’UE à mettre en œuvre ses politiques de manière efficace.

Une fonction publique efficace et performante est essentielle pour gérer les programmes, les politiques et les initiatives stratégiques de l’UE, y compris ceux liés à la défense et à la sécurité, mais aussi pour tout ce que fait l’UE, de l’action climatique à la santé en passant par le développement économique des régions les moins développées du continent. Au fur et à mesure que les discussions sur les futurs budgets progressent, l’un des principaux défis consistera à trouver un équilibre entre les nouvelles priorités défensives et le maintien d’une base institutionnelle solide et des valeurs de l’UE que sont la transparence, le professionnalisme, l’intégrité, la stabilité et l’équité de l’emploi, ainsi que l’égalité de rémunération pour un travail égal, pour son propre personnel.

Alors que la fonction publique de l’UE est confrontée à ces défis croissants, il est essentiel d’examiner les implications plus larges de ces changements. De la précarité de l’emploi au sein des institutions européennes à l’évolution de la mobilité du personnel et aux changements dans les systèmes de pension, les conséquences de ces changements budgétaires et politiques sont d’une grande portée. Dans cette édition d’AGORA #94, nous explorons une série de perspectives et offrons un aperçu plus approfondi de ces questions complexes à travers une série d’articles de fond qui examinent à la fois l’état actuel et l’avenir de la main-d’œuvre de l’UE.

Aleksandra FALCONE

A PROPOS DE L’AUTEUR

Aleksandra Falcone a une expérience internationale étendue en matière de gestion de projets financés par l’UE, d’analyse des politiques et de planification stratégique. Depuis 2006, elle travaille à la Fondation européenne pour la formation (ETF) en tant que responsable de la Stratégie. Elle a été analyste politique à l’ambassade d’Italie à Belgrade, fournissant des informations sur les développements politiques, militaires et économiques, chef adjoint de l’administration à la Mission de surveillance de la Communauté européenne (EUMM), et a participé aux opérations de l’OSCE au Kosovo*. Elle a également une expérience militaire en tant que capitaine dans l’intendance de l’armée italienne. Titulaire d’une maîtrise en économie et experte en supervision, évaluation et gestion financière, elle s’est spécialisée dans la promotion de la coopération internationale et du développement institutionnel.

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¹ Cette désignation est sans préjudice des positions sur le statut et est conforme à la résolution 1244/1999 du Conseil de sécurité des Nations unies et à l’avis de la Cour internationale de justice sur la déclaration d’indépendance du Kosovo.